Ce jour-là, l'alpage, abandonné par les vaches parties rejoindre les étables plus bas dans la vallée, nous accueillait, un peu rêveur, endormi avant l'heure, se reposant d'un été parfois trop bruissant de senteurs multiples. Quelques mésanges voletaient encore ici et là, se posant délicatement sur les branches des sapins philosophes, les réconfortant de leurs caresses furtives, alors qu'eux savaient bien que l'hiver arriverait, tôt ou tard.
Les herbes jaunies contaient des saveurs disparues que l'on retrouverait peut-être dans une fondue odorante, les grands froids revenus.
Ce ciel presque trop bleu, ces bouquets de sapins toujours verts et fiers malgré l'automne finissant, ces prairies passées qui craquelaient sous mes pas, ont pourtant suffi à mon bonheur, comme un tout petit rien qu'il fallait déguster lentement, de peur qu'il ne disparaisse trop vite pour ne plus jamais revenir.
Comme il était doux de cheminer sur ces sentiers lumineux, de tenir ta main et de contempler l'horizon lointain qu'on n'atteindrait jamais.
Presque bouleversés par tant de simplicité, il nous fallut pourtant rentrer et laisser l'alpage, grand penseur de la sérénité, aux prises avec son destin blanc déjà annoncé.
Dédé © Novembre 2022