vendredi 26 avril 2019

Néant



Dans un crissement de freins qui avait réveillé nombre de voyageurs assoupis, le train s’était arrêté dans une gare qui semblait totalement désaffectée. L’heure indiquée sur l’horloge ne correspondait pas à la réalité, personne n’attendait sur le quai et une petite remorque semblait avoir été oubliée là depuis des lustres, seule et abandonnée sous la pluie battante.

Du bâtiment gris et sombre se dégageait une impression de tristesse infinie et l’orage qui venait de s’abattre sur la région ne faisait que renforcer cette atmosphère lugubre. L’eau ruisselait sur la vitre et à travers les traînées de pluie, je tentais vainement d’apercevoir une note vivante dans ce tableau amorphe. Mais rien ne bougea, comme si le temps s’était arrêté à l’heure indiquée sur la grosse pendule immobile.

Personne d’autre que moi dans le convoi ne semblait s’intéresser à ce qui se passait à l’extérieur et la petite gare resta seule sous la pluie qui redoublait d’intensité.  Lentement, le train reprit sa route dans un crissement aigu, rapidement suivi par le roulis régulier des roues sur les rails.

Pourquoi donc le train avait arrêté sa course dans un tel endroit ? Pourquoi personne n’était descendu et aucun voyageur n’avait rejoint le convoi ? Engoncée dans mes pensées et les yeux prisonniers des figures que la pluie dessinait sur les vitres, je ne vis pas tout de suite que le convoi s’était vidé de ses voyageurs alors qu’il continuait pourtant sa course monotone, sans aucun arrêt. Mais soudain, l’angoisse m’étreignit quand je me rendis compte que j’étais seule, irrémédiablement seule et que les autres personnes s’étaient comme volatilisées sans laisser de traces, même pas une valise oubliée sur un porte-bagage.

La réalité s’imposa peu à peu à mon esprit, effrayante, glaçante. J’étais à présent seule dans un train fantôme et je ne savais pas où il me menait.


 

Elle n’atteignit jamais sa destination. Le train avait disparu dans le tunnel et n’avait pas réapparu à l’autre bout. D’ailleurs, les horaires n’avaient jamais mentionné ce convoi.  La jeune femme s’était évanouie dans le néant, comme aspirée dans une autre dimension.



Dédé © Avril 2019

vendredi 12 avril 2019

Avancer



Ce jour-là, j’avançais sur le chemin encore blanc. Je ne savais pas où tout cela me mènerait, juste que c’étaient toujours les mêmes pensées qui m’assaillaient. Mais dans cet hiver finissant, sur cette neige fraîchement tombée la veille, il y a eu comme un air de printemps qui a soufflé soudainement, magnifié par le chant de la petite mésange perchée sur l’arbre encore dépouillé.

Et ces quelques notes se sont envolées, emplissant le fond de la vallée, remontant jusqu’au sommet de la montagne, emportant une touche d’espoir jusqu’aux confins de l’humanité.

Il fallait avancer, coûte que coûte et ne rien regretter.


Dédé © Avril 2019