Mais ce jour-là, le ciel avait décidé de n'en faire qu'à sa tête et l'atmosphère ressemblait plutôt à celle de l'Ecosse, si ce n'était cette architecture majestueuse d'églises et de palais typiquement italienne qui contredisait notre sensation de froid et d'humidité. Et pendant qu'une procession de parapluies bariolés parcourait les petites ruelles pour que leurs propriétaires transis se réchauffent dans une auberge avec un bon espresso, les terrasses du bord de l'eau restaient désertes et bien silencieuses.
Même si nous étions douchés malgré nos parapluies, nous pouvions nous considérer comme chanceux par rapport à ce qui se passait à l'autre bout du pays. En effet, les images venues de l'Emilie-Romagne étaient plus que désolantes. Ravagée par des pluies diluviennes qui ne voulaient pas s'interrompre, la région subissait l'ire des cieux et les dégâts étaient déjà incommensurables.
Nous ne pouvions qu'être solidaires par la pensée et espérer que le soleil brillerait rapidement. Mais le lendemain et le surlendemain, les dieux en colère ont détourné leur attention de l'Emilie-Romagne pour déverser leur trop-plein de vengeance cette fois-ci sur le Piémont que nous avions rejoint. Les brumes encerclaient les vignes, les châteaux se perdaient dans les nuages menaçants, les routes sillonnant les collines étaient détrempées et les rivières, sous haute surveillance, dévalaient les contreforts alpins pour se jeter dans un Pô déjà bien trop rempli. Et malgré la dégustation de produits locaux dans des auberges très accueillantes qui nous redonnait un peu de baume au coeur, nous ne pouvions que reconsidérer le fait que les catastrophes naturelles ne sont plus seulement l'apanage de pays lointains mais frappent également à nos portes, remettant en cause toutes nos belles certitudes sur le fait que l'Ailleurs est très loin de l'Ici.
Dédé © Mai 2023