vendredi 21 mars 2025

Flocons timorés

 


Il avait pourtant commencé à le chanter durant la semaine écoulée. Mais, en ce dimanche matin, élégant jouvenceau vêtu de noir, le merle est revenu nous saluer après un petit passage dans la mangeoire, presque désolé d'avoir annoncé trop tôt que le printemps était arrivé. 

Ce n'était pas les mésanges espiègles qui allaient le contredire. Et toute la forêt, frigorifiée dans cette neige nouvelle, acquiesçait aussi en silence. 

Tout bien considéré, on ne pouvait que s'incliner devant ces flocons bien timorés car à cette altitude, le printemps n'était jamais bien pressé de s'installer. 

Pourtant, dans l'air froid, quelque chose avait changé et annonçait un renouveau auquel on voulait absolument croire. 

Un flocon, c'est un peu comme une fleur. Il suffit de rêver. 


P.S. Alors que sur beaucoup de blogs amis, je vois des photos de fleurs qui chantent le printemps, vous m'excuserez de refroidir un peu l'atmosphère. :-) En montagne, l'hiver n'est jamais très loin du printemps. Cette photo le prouve car elle date du 16 mars dernier. J'ai aimé cette forêt dans le brouillard et en attente de jours meilleurs.


Dédé@Mars 2025

vendredi 7 mars 2025

Vaincre tous les déserts


Dunes de Maspalomas, Gran Canaria


Notre existence n'est que formations fugitives de sable mouvant, nées d'un coup de vent et disparues à jamais dans le prochain souffle. Et il ne restera peut-être après nous que ce que nous aurons bien voulu laisser : des mots écrits ici et là, l'empreinte de quelques doux baisers échangés, une ou deux paroles prononcées qui subisteront en suspension dans l'atmosphère et puis s'anéantiront elles aussi dans le fracas de l'univers. 

Alors, devant cette certitude de disparaître un jour, pourquoi vouloir tant être immortel? Car ce doit être terriblement ennuyeux et déprimant de savoir que ce qui se passe aujourd'hui ou demain ne joue finalement aucun rôle. En effet, d'autres jours viendront encore et toujours, d'autres mois, d'autres années et ainsi, qu'est-ce qui pourrait avoir encore tant d'importance dans cette valse du temps infinie? 

Eternels, nous n'aurions plus à courir après le temps, nous en disposerions sans limite et sans nous presser et il serait totalement indifférent d'accomplir quelque chose dans l'instant présent ou le lendemain. Et les regrets n'auraient plus aucun sens car il resterait toujours du temps pour rattraper ce que nous aurions éventuellement perdu. 

Alors même si nous ne sommes en réalité qu'un grain de sable dans cette immensité, même si nos traces de pas s'effaceront inéluctablement après notre passage, il n'est pas encore trop tard pour se mettre en marche, le coeur ouvert sur le monde. En héritage, nous laisserons possiblement quelques particules infinitésimales de joie qui, en s'amoncellant, vaincront la lente agonie du sablier du temps.

Et il ne serait pas déraisonnable d'espérer que ces minuscules poussières fleuriront afin de vaincre tous les déserts et toutes les guerres du monde. 

Dédé@Mars 2025